Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/129

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çoit que des propos en l’air… La crainte d’en trop dire nous tenoit dans une gêne extrêmement fatigante.

Pour ſortir d’embarras, la Marquiſe me fît obſerver que je devois voir la Communauté, au moins celles des Religieuſes & Penſionnaires, avec qui j’avois été liée plus étroitement. Toutes m’étoient aſſez égales ; Madame de Saintal étoit abſente, ainſi je priai ma ſœur de faire une invitation générale.

La curioſité ne laiſſa qui que ce fût en arriere… En quatre minutes j’eus à répondre aux compliments, aux queſtions de trente perſonnes à la fois.

Ma mere, que ce bavardage ennuyoit, en prit occaſion d’aller faire une emplette à quelques pas du Couvent. A peine elle fut partie, qu’un Office ſonna ; tout le monde s’y tendit, excepté ma ſœur, à qui l’on permit de reſter.

C’étoit l’inſtant de la criſe. Je mourois d’envie d’interroger Mademoiſelle d’Aulnai, & de peur d’avoir mon tour.

Dès que nous fûmes ſeules, elle me regarda d’un certain air… qui ſembloit dire : “ Je veux pénétrer juſqu’au fond de ton ame. „ Etes-vous heureuſe, me demanda-t-elle ? Je me ſoumets aux circonſtances, dis-je, & la raiſon me preſcrit d’en ti-