Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/131

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qu’on nous laiſſe peut me délivrer d’une perplexité bien cruelle. Inftruiſez-moi par quelle étonnante révolution je vous vois revêtue d’un habit que vous déteſtiez ? Seroit-ce ma mere qui vous y auroit forcée ? Votre mere ! s’écria-t-elle ; me connoiſſez-vous aſſez mal pour le ſuppoſer ? — Je vous connois, ſans doute ; mais je ſais auſſi qu’avec une grande fermeté, on peut céder quelquefois à des volontés plus abſolues. — Eh ! vous avez cru que j’étois dans ce cas ? — Oui. — C’étoit me juger d’après vous : rien de plus naturel… Vous vous êtes trompée, & vous tromperez toujours à la comparaiſon… Madame de Rozane n’a point interpoſé ſon autorité pour me faire embraſſer cet état ; je m’y ſuis même décidée dans un temps où la crainte de vous perdre, conſéquemment celle de reſter ſans enfants, ſi je prenois le voile, m’a fait éprouver, de ſa part, d’aſſez fortes oppoſitions.

Que tout ce que j’entends eſt ſingulier ! m’écriai-je. Que j’étois injuſte, quand j’accuſois ma mere de vous avoir ſacrifiée ! On peut l’être de plus d’une maniere, dit ma ſœur ; mais je répete qu’en prenant cet habit, je n’ai fait que ce que j’ai voulu. — Seroit-ce une ferveur ſubite qui vous auroit portée à le demander ? — Non. — Je m’y perds, & vous conjure. — De quoi ?