Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/146

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L’impreſſion de triſfteſſe que j’avois reçue dans le cours de cette journée, ne s’effaça pis en m’éloignant des objets qui l’avoient produite : au contraire, je ſentis ce qu’on ſent preſque toujours à la perte des perſonnes avec qui on a vécu dans l’intimité. Les inconvénients attachés à ces liaiſons diſparoiſſent ; on n’en voit plus que les avantages ; on s’exagere les reſſources qu’on en a tirées, & celles qu’on pouvoit en tirer encore.

Ma ſœur avoit peu ménagé mon amour-propre, lorſqu’elle avoit été en poſſeſſion de ma confiance ; depuis, je l’avois moi-même preſque abandonnée. Notre rapprochement auroit ſouffert des difficultés, en toute poſition. Malgré cela, je me rappellois douloureuſement qu’elle m’avoit écoutée, conſolée, ſoutenue… Un tel ſecours me redevenoit ſi néceſſaire ! j’avois tant de choſes à verſer dans le ſein de l’amitié ! Malheureuſement mes chagrins n’étoient plus du reſſort de Mademoiſelle d’Aulnai. C’étoit des conſeils qu’il me falloit ; une Religieuſe ne pouvoit & ne devoit me donner que des leçons.

On auroit peine à croire la ſermentation qui s’enſuivit d’un événement ſi peu fait pour en opérer de ſemblables. J’errois ſans guide dans le labyrinthe de mes idées, de