Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/151

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beau qu’il puiſſe être, j’imagine que nous pouvons traiter une matiere plus intéreſſante. Nous nous connoiſſons aſſez pour uſer, l’un envers l’autre, d’une entiere franchiſe. Je pourrois juſtement vous reprocher de ne vous l’être pas dit plutôt ; mais cette petite délicateſſe m’éloigneroit de mon but… Mes vues ſont ſimples, mes procédés ſeront de même. A-t-on beſoin de tournure dans une choſe dictée par la raiſon, & qui doit être ſous la garde de la vertu ?… Je m’explique.

Vous avez des peines, j’en crois ſur cela votre profonde mélancolie ; j’en ai auſſi qui rempliſſent quelquefois mon ame d’amertume ; la compatiſſante amitié les ſoulageroit toutes. Déjà nous en avons fait l’expérience ; il ne tient qu’à nous de l’expérimenter encore… Soyons amis, Comte ; établiſſons entre nous un commerce de confiance, qui nous aide à ſupporter les chagrins cuiſants de la vie ; je verſerai les miens dans votre cœur, & j’adoucirai ceux que vous pourrez avoir en les partageant… Mais… je vous vois frappé d’un ſingulier étonnement ! De grâce, inſtruiſez-moi de ce qu’il ſignifie. — Que j’admire un tel projet, & la liberté d’eſprit avec laquelle vous me le propoſez ; ſeulement je ſuis fâché de ne pouvoir concourir à ſon exécution, puiſqu’il vous plaît… Madame, ſi j’ai des ſe-