Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/152

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crets, je ne dois, ni vous les révéler, ni devenir le dépoſitaire des vôtres.

Quoi, Monſieur, m’écriai-je, vous refuſez d’être mon ami ? — Ami ſoit ; je vous veux aſſez de bien pour mériter ce titre ; mais je répete que celui de confident ne ſauroit être le mien auprès de vous.

La ſuppoſition d’un refus n’étoit pas entrée dans mes arrangements ; il me confondit au point de reſter muette, de ne plus voir que des brouillards. Le Comte me laiſſa le temps de me remettre… Nous fûmes un quart-d’heure ſans parler. Il traçoit d’un air diſtrait des lignes ſur le ſable, avec une canne. J’arrachois les feuilles, les branches de la charmille, que je mettois en pièces. Enfin, les nuages ſe diſſiperent un peu ; je ſentis ma colere s’enflammer par degrés… Quelle opinion, Monſieur, avez-vous donc de mes ſecrets, pour vous défendre ainſi de les pénétrer ? demandai-je fiérement. Vous me mettez ſans doute au rang de ces femmes dont la confidence déshonore preſque également celles qui la font, & ceux qui la reçoivent… Une telle indignité a lieu de me ſurprendre, nommément de votre part ; quand je l’aurois méritée, vous auriez été le dernier des hommes dont j’aurois cru la devoir craindre. — Vous auriez eu tort ; ſi vous étiez de ce nombre mépriſable, je