Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/168

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 56 )

contraſte humiliant de mes privations, acheverent de m’aliéner à votre arrivée au Couvent.

„ Les ſoins, la ſageſſe de Madame de Saintal ; vos timides prévenances ; la ſupériorité que je me trouvai du côté du ſavoir, flatterent mon amour-propre, aſſoupirent ma haine, au point que je la crus détruite. Je me trompois : elle reprit toute ſa force, quand vous vîntes, ivre de joie, m’annoncer que vous alliez retourner dans le monde, pendant qu’on ne me laiſſoit entrevoir aucun terme à ma captivité.

„ Vous partîtes : il m’en coûta des larmes, dont on fit honneur à l’amitié, quoique le dépit ſeul les arrachât de mes yeux. Mais avant que de me quitter, vous aviez ouvert mon ame aux preſtiges de l’amour, & préparé mes ſens à la ſéduction des plaiſirs.

„ Dépoſitaire de votre premier penchant, & des tranſports que l’idée du mariage vous faiſoit éprouver, j’écoutai d’abord avec étonnement, puis avec intérêt… Enfin, la contagion produiſit ſon effet. Le feu de votre imagination paſſa tout entier dans mon cœur. Je recueillois vos paroles ; j’étudiois vos mouvements ; je donnois aux uns & aux autres