Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/26

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bitude de vivre enſemble, & aux rapprochements néceſſaires de notre poſition : la mal-adreſſe des Religieuſes penſa détruire ce ſage projet.

Mademoiſelle d’Aulnai étoit telle que la nature & les inſtructions du Couvent l’avoient formée ; on avoit, au contraire, prodigué tous les ſoins poſſibles pour me donner des graces, des talents… J’avois la voix belle, du babil, l’air du monde, c’en étoit plus qu’il n’en falloit pour m’attirer l’admiration générale. Je fus louée, prônée, careſſée & propoſée pour modele à ma ſœur. Enorgueillie de mes ſuccès, j’élevai le ton, je redoublai de dédains avec elle ; quoique j’en fuſſe repouſſée d’une façon à m’atterrer… Nous nous aigriſſions de plus en plus ; les altercations ſe renouvelloient ſans ceſſe, & malheureuſement on me donnoit toujours raiſon… La Comteſſe ſentit que loin de faire fond ſur ce qu’elle avoit regardé comme un moyen de conciliation, il falloit ſe hâter d’en prévenir les effets… On m’avoit accordé une permiſſion illimitée de la voir elle demanda la même grace pour ma ſœur, & l’obtint. Accoutumée aux diſtinctions flatteuſes, je fus piquée de ſa démarche, & je lui en marquai un peu d’humeur. Comment ! me dit-elle, auriez-vous de la répugnance à vous rencontrer avec