Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/27

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votre ſœur ? — Non, Madame ; mais je croyois que vous mettriez quelque différence entre nous, & que j’irois chez vous plus ſouvent qu’elle. — Pourquoi cela ? — Parce que je vous aime, & que je me flattois d’être aimée davantage. Et bien, c’eſt pour qu’elle m’aime, & pour l’aimer auſſi, que je deſire de la voir… Lui envieriez-vous la douceur d’avoir une amie ? A cela je détournai la tête, & ne répondis point. Penſez, ajouta-t-elle, combien cette reſſource lui eſt néceſſaire ; combien il y auroit d’inhumanité à vouloir l’en priver. Etrangere en quelque ſorte à ſa famille, elle a paſſé ſon enfance loin de la maiſon paternelle, tandis que vos parents embelliſſoient, par leur tendreſſe, tous les moments de la vôtre… Cependant elle avoit les mêmes droits à leur affection, & vous devez… Je ne dois rien, Madame, interrompis-je vivement ; ce n’eſt pas ma faute ſi ma ſœur n’eſt point aimée. Je ne vous en accuſe pas non plus, reprit-elle ; ſi j’avois une pareille idée, je vous traiterois comme une méchante qu’il faudroit fuir & déteſter ; mais avez-vous cherché à la dédommager par vos ſoins, par votre attachement, des mortifications qu’elle éprouvoit d’ailleurs ? Qui, moi ? m’écriai-je ; eh ! l’aurois-je pu ? Ne voyez-vous pas que ma ſœur me hait ?… Soyez ſûre qu’elle