Page:Bonaparte - Un mois en Afrique, 1850.djvu/79

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arrivâmes à Batna fort avant dans la nuit ; nous avions parcouru une double étape de soixante-onze kilomètres.

M. le lieutenant-colonel de Caprez me reçut avec sa cordialité accoutumée, et m’installa dans le quartier de M. le colonel Carbuccia. Il m’apprit que je rencontrerais, avant d’arriver à Constantine, une partie des renforts attendus à la colonne. Le lendemain, avec M. Osman, jeune lieutenant indigène, et quelques-uns de ses spahis, j’allai coucher à Aïn-Yagout.

Le surlendemain, 3 novembre, près du lac salé dont j’ai parlé, nous fîmes une chasse fort singulière. M. Osman ayant aperçu, fort loin dans la plaine, une hyène qui se dirigeait vers les montagnes à droite, deux ou trois de nos spahis se mirent à sa poursuite. Ils la rejoignirent bientôt et lui tirèrent, sans l’atteindre, plusieurs coups de fusil. Mettant le sabre à la main, un de ces cavaliers lui porta alors un coup de pointe, qui la blessa très légèrement ; mais le cheval de cet homme s’étant abattu en même temps, il se trouva sur l’hyène, qu’il maîtrisa sans en être mordu. Nous accourûmes tous ; à l’aide de ses camarades, qui avaient mis pied à terre, il la musela avec des cordes. Attachée par le cou à une courroie de charge, elle marcha quelque temps devant lui, et comme elle nous embarrassait, on la tua avec un couteau. Quoiqu’elle fût énorme, elle paraissait saisie de terreur, elle ne poussa pas un cri, et n’opposa pas la moindre résistance. Je savais que ces animaux ne sont pas très dangereux ; mais je fus étonné et presque touché de la mansuétude de notre capture. Sa fourrure était fort belle, mais, usée par les cordes qui nous avaient servi à la fixer sur le bât d’un mulet, je ne pus la conserver. Les spahis, à ma surprise, mangèrent la viande au bivouac du soir.