Page:Bonnerot - Romain Rolland sa vie son oeuvre.djvu/15

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Un visage pâle et maigre d’ascète et de rêveur ; moustache blonde et courte ; cheveux grisonnants bien lissés ; deux grands yeux gris bleu, deux éclairs, deux rayons vivants animent et illuminent l’ovale allongé de cette figure souffrante, d’un abord si réservé qu’il en devient timide ; gauche de gestes, parce qu’il ne se sent pas à son aise devant un visiteur ; parlant d’une voix fine et frêle qui, parfois, s’enfièvre, s’emporte pour affirmer une vérité, tel est Romain Rolland.

Son portrait n’a jamais été exposé aux vitrines des libraires entre la photographie d’une chanteuse de l’Opéra et d’un ministre. Lui-même, quand il vivait à Paris, n’était pas un habitué des vernissages ou des premières. Et seuls se rappellent peut-être sa silhouette, ceux qui ont suivi ses cours d’histoire de la musique en Sorbonne ou à l’École des Hautes Études Sociales, ou qui l’ont aperçu certains jeudis, dans la petite boutique des Cahiers de la Quinzaine, entre Charles Péguy, les frères Tharaud, Daniel Halévy ou Georges Sorel.

Mais ses livres sont universellement connus. L’Aube, en France, a atteint 115 éditions, et tous les autres volumes de Jean-Christophe ont dépassé 50 éditions. Des traductions anglaises, allemandes, espagnoles, hollandaises, italiennes, danoises, polonaises, russes et suédoises attestent depuis longtemps sa renommée dans le monde. On peut aimer ou ne pas aimer son œuvre, mais on ne peut pas plus la négliger qu’on ne peut ignorer sa