laissa convaincre et, le 17 octobre 1889, il était nommé élève à l’École française d’Archéologie et d’Histoire.
Le mois suivant, il partit pour l’Italie. Brusquement, comme un adolescent devant une femme, hier inconnue ou dédaignée, reçoit en plein cœur un coup de passion, il se sentit charmé, saisi, vaincu. Il s’éprit de Rome avec autant de naïveté que d’enthousiasme ; il connut ses musées, ses monuments, ses archives ; surtout il aima son ciel, son paysage. Mais il fréquentait peu ses camarades « Romains »: Audollent, Gsell, Jordan, — d’une promotion plus ancienne — et qui étaient tout le jour absorbés par leurs recherches d’érudition aux archives. Il vivait à l’écart, silencieux et presque sauvage. Un clair souvenir de ces jours de flânerie et de découverte éclaire doucement quelques pages de Jean-Christophe (La Nouvelle Journée, pp. 28-41). « La lumière romaine, les jardins suspendus, la Campagne que ceint comme d’une écharpe d’or la mer ensoleillée, lui révélèrent peu à peu le secret de la terre enchantée. » Surtout il fit la connaissance d’une femme dont les idées et l’amitié eurent sur lui une grande influence. Mlle Malwida de Meysenbug à qui l’avait recommandé son maître de l’École Normale, le professeur Gabriel Monod.
Mlle Malwida de Meysenbug, alors âgée de 72 ans, habitait derrière le Colisée, via Polveriera, un petit appartement, où l’on venait de partout en foule, comme en pèlerinage. L’histoire souffrante et courageuse de sa vie, autant que sa belle intelligence, justifiaient l’admiration et le véritable culte dont on l’entourait. Elle était née en 1816, à Cassel, la neuvième de dix enfants, d’une famille de protestants français réfugiés au xviie siècle. Son père, baron, était premier ministre de l’Électeur