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CHARLOT S’AMUSE

nait le gamin gouailleur, faisait le portrait-charge des autres frères, raillant leurs défauts, leurs ridicules, les déshabillant avec une féroce et précoce ironie. Origène, rassuré, ricanait à son tour, révélant sur ses confrères des détails que le petit ne savait point et qui les faisaient rire tous deux jusqu’aux larmes. La soutane et le ventre d’Hilarion, son odeur de chien mouillé, le nez de Sulpice, le visage bourgeonnant d’Eusèbe revenaient ainsi tous les soirs dans leur conversation, mêlés aux petits faits de la journée.

Origène avait toujours, d’ailleurs, à se venger. Sa jalousie était éveillée tout le jour. Les autres ignorantins poursuivaient en effet Charlot de leurs prévenances et de leurs caresses goulues, l’embrassant à tout propos en dehors des heures de classe, quand ils étaient seuls à l’école avec lui, et au réfectoire, le comblant de friandises. Le gamin, content, ne découvrait à cela aucun mal, s’étonnant de voir son bon ami froncer les sourcils et lui faire de gros yeux. Le maître ne pouvait le mettre en garde et, dans sa jalouse impuissance, il se rongeait les poings. À la fin, il témoigna imprudemment son mécontentement et des querelles éclatèrent entre les quatre hommes. Charlot en surprit les éclats, navré d’entendre