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Page:Bonnetain - Charlot s'amuse, 1883.djvu/127

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CHARLOT S’AMUSE

dain soumis devant cette terrifiante évocation de leur sinistre passé.

— À genoux, mes frères ! commanda alors Hilarion, satisfait de remporter, et voulant, en redevenant plus doux, amollir la haine dévotement féroce qu’il lisait à présent dans les yeux de ses compagnons ; à genoux ! nous sommes tous de grands coupables… La chair est faible… Demandons des forces à la sainte Vierge contre les tentations. Un Confiteor et un acte de contrition… La colère est pire encore que la luxure…

Les quatre hommes se mirent en prières. Charlot entendit sur le parquet le heurt sec de leurs genoux, et la querelle s’acheva dans un marmottement confus de patenôtres. Repris par la passivité des habitudes machinales, les ignorantins, les lèvres tremblant encore de fureur et les yeux enflammés, avaient retrouvé leur bredouillement en fredon, donnant tous de la voix aux mêmes passages, et au mea culpa se martelant la poitrine avec ensemble, d’un mouvement uniforme, bien rythmé, dont la cadence régulière scandait nettement, comme dans un maniement d’armes, le coup des doigts réunis s’abattant sur leur thorax dans un résonnement creux.

Le lendemain, la vie ordinaire reprenait son