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CHARLOT S’AMUSE

son petit protégé, charmant sous le costume de cérémonie qu’elle lui avait fait faire, elle se prit à l’aimer. Elle le dorlota, le cajolant avec une tendresse naissante qui amollissait sa roideur desséchée de vieille fille. Elle n’avait jamais connu d’autres joies que celles de patronner des œuvres pieuses et de politiquer avec Monseigneur. Les rancunes aigries de son célibat s’étaient écoulées jusque-là dans une dévotion outrée et dans une vague affection pour le vicaire général, affection que son âge faisait chaste et calme, et dont son havanais Fuchs prenait sa part. Mais, brusquement, devant l’enfant, quelque chose se fondit en elle. Ce fut comme une révélation.

Dès lors, tous les dimanches et tous les jeudis, elle fit sortir Charlot ; rajeunie par le sentiment de maternité qui s’éveillait dans son cœur, elle l’appelait à son tour : « cher bébé ». Le gamin naturellement l’adora, reportant sur elle son besoin d’aimer et sentant en même temps s’amoindrir sa dévotion et se refroidir son religieux enthousiasme. À présent, il bâillait à l’église, s’endormait au sermon et considérait la confession comme une corvée à retours périodiques, trop fréquents. Bientôt, Mlle de Closberry, sa protectrice, trouva les journées bien longues entre les deux jours de