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CHARLOT S’AMUSE

prédiction et ces conseils, en constatant l’impossibilité de trouver une femme qui voulut de lui. Il se reprochait continuellement sa timidité. Sans doute, il fallait être plus hardi et ne pas se rebuter. Pourquoi rougissait-il aux premiers mots qu’il adressait aux promeneuses ?

Comme à Saint-Dié, comme à Toulon, il éprouvait un incessant écrasement et se sentait seul dans la foule. Il lui semblait que s’il avait connu quelqu’un, il aurait été plus audacieux, plus habile. Un camarade de son âge lui aurait été d’un grand service, pensait-il, et aurait fait son éducation, mais par malheur il ne connaissait personne ; il était le seul employé du marchand de fer. Alors, il songea aux filles qui font le trottoir. Le manque d’argent l’en avait éloigné jusque-là, mais le jour où il toucherait ses premiers appointements, il se risquerait. Il avait justement remarqué une petite femme brune, assez jolie, qui, tous les soirs, stationnait au carrefour de la rue de Lancry, de la rue des Marais et du boulevard Magenta. Il commencerait par elle.

Le soir même où il fut payé, il se fit accoster et la suivit, croyant se rendre à quelque hôtel. La fille l’emmena rue des Marais, et le poussa dans un couloir sale, au bout duquel elle ouvrit