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CHARLOT S’AMUSE

de ne pas être assez belle et de paraître trop paysanne. Sa toilette lui prit une heure ; elle mit le linge de noces de sa mère et sa coquetterie rustique inventa d’ingénieux atours. Puis, elle courut à la cuisine. L’abbé était déjà parti dire sa messe. Anxieuse, elle lui prépara son déjeuner, prise d’une palpitation folle, et, cent fois, regardant l’heure au vieux coucou.

Enfin, le prêtre revint. Anne, n’osant plus le regarder, monta chez le vieux curé ; elle le trouva rendormi sur un bol vide. La vieille servante était partie laver le linge, la jeune fille se trouvait donc seule à la maison : il fallait profiter de cette heure de liberté. La porte du vicaire s’ouvrit doucement comme elle descendait : elle entra.

Tout de suite, il la saisit, violent, brutal. La sueur au front, les dents serrées, il l’étreignait, et, sans égards pour sa toilette de fête, il lui arrachait ses vêtements d’une main qui tremblait. Elle était sans voix et sans forces, défaillante déjà, s’étonnant cependant de voir l’angélique visage de l’abbé se contracter et d’entendre le han ! époumonné de sa respiration. Et quand elle fut couchée sur le lit, quand, durant de longues minutes, il se fut repu du spectacle de ses nudités mystérieuses, il se rua sur elle avec l’effroyable déchaînement de toute sa jeunesse