Page:Borel - Champavert, 1833.djvu/17

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– Tout bas, mon âme honteuse
Bénissait ta voix flatteuse
Qui caressait son malheur ;
Car toi seul, au sort austère
Qui m’accablait solitaire,
Léon, tu donnas un pleur.

Quoi ! ma franchise te blesse ?
Voudrais-tu que, par faiblesse,
On voilât sa pauvreté ?
Non ! non ! nouveau Malfilâtre,
Je veux, au siècle parâtre,
Étaler ma nudité !

Je le veux, afin qu’on sache
Que je ne suis point un lâche,
Car j’eus deux parts de douleur
À ce banquet de la terre,
Car, bien jeune, la misère
N’a pu briser ma verdeur.

Je le veux, afin qu’on sache
Que je n’ai que ma moustache,
Ma guitare, et puis mon cœur
Qui se rit de la détresse ;
Et que mon âme maîtresse
Contre tout surgit vainqueur.

Je le veux, afin qu’on sache
Que, sans toge et sans rondache,
Ni chancelier, ni baron,
Je ne suis point gentilhomme,