Page:Borel - Champavert, 1833.djvu/344

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— Veuillez croire que c’est le motif unique et sérieux de ma visite.

— Plaisant original !

— Sans plus d’exorde, voilà le cas. Depuis long-temps je voulais trancher mon existence qui me lasse et m’importune, mon leurre était encore acharné de quelque espoir, je remettais de jour en jour ; enfin, misérable portefaix des misères humaines, je romps sous le fardeau, et viens le déposer.

— Vous, sitôt las de la vie ! et pourquoi, mon ami ?

— La vie est facultative, on peut la tolérer à certaines conditions, à la condition du bonheur, et l’on peut, certes, à bon droit, la trancher quand elle ne nous apporte que souffrances ; on m’a imposé l’existence sans mon gré, comme on m’a imposé le baptême ; j’ai abjuré le baptême ; aujourd’hui, je revendique le néant.

— Seriez-vous isolé, sans parents ?

— J’en ai trop.

— Êtes-vous sans fortune ?

— Le veau d’or n’est pas mon Dieu.

— N’avez-vous pas quelque amour pour la science ?