Page:Borel - Champavert, 1833.djvu/432

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fosse, lâches, que je vous dis cela ! Je ne veux pas d’une autre vie, j’en ai assez de vivre, c’est le néant que j’appelle !

— Taisez-vous, taisez-vous, Champavert, ne blasphémez pas ainsi ; si vous saviez, votre regard est affreux ! Mais quelle serait donc, mon ami, la récompense des malheureux torturés ici-bas ?

— Qui dédommagera le cheval de ses sueurs, la forêt de la hache, de la scie et du feu ?… Sans doute, il y a une autre vie aussi pour les chevaux et les chênes ?… Un paradis !…

— Vous êtes égaré, taisez-vous, Champavert, Dieu vous entend ; ne craignez-vous pas son tonnerre ?

— S’il était un Dieu qui lançât la foudre, je le défierais ! Qu’il me lance donc sa foudre, ce Dieu puissant qui entend tout, je le défie !… Tiens, je crache contre le ciel ! tiens, regarde là-bas, vois-tu ce pauvre tonnerre qui se perd à l’horizon ? on dirait qu’il a peur de moi. Ah ! franchement, ton Dieu n’est pas susceptible sur le point d’honneur : si j’étais Dieu, si j’avais des tonnerres à la main, oh ! je ne me laisserais pas insulter, défier par un insecte, un ver de terre !