Page:Borel - Champavert, 1833.djvu/53

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le monde, où elle avait tant souffert, elle venait d’écrire à la supérieure du couvent de Saint-Thomas afin d’y être admise en noviciat. J’eus beaucoup de peine à la détourner de ce projet : je lui fis sentir qu’assurément elle se tuerait en embrassant une vie austère après toutes les douleurs qui l’avaient affaiblie. Enfin, elle se rendit.

Je ne m’abuse point assez sur moi-même, pour croire que cette douce Apolline ait un amour vif pour moi : elle me chérit comme son père ; je suis pour elle un tuteur généreux, un ami compatissant. Elle est d’autant plus attachée à moi, que jusque-là elle n’avait rencontré que des êtres égoïstes et féroces. Elle est bonne, sensible, bienveillante, sans folie, que pourrais-je demander de plus ? Tous les dons que j’ai voulu lui offrir, tous les présents que je lui ai portés, noblement elle a tout refusé : il est de son devoir, dit-elle, d’agir ainsi, et qu’une fille d’honneur ne saurait rien accepter que de son époux. Aussi lui ai-je promis que nous serions unis avant peu ; cette pensée l’a remplie de joie. Je lui avais donc demandé pour demain soir, à neuf heures, un rendez-vous chez elle,