Page:Borel - Champavert, 1833.djvu/77

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

goureusement, et qu’elle semblait affectionner par-dessus toutes.

 
Bourreaux, arrêtez ma torture !
Le mal a fait mon cœur mauvais :
Haine à toi Dieu, monde, nature,
Haine à tout ce que je rêvais !…
Avant mon corps, sur cette roue
Où le sort le tient garrotté,
Mon âme expire, et je la voue
À Satan, pour l’éternité !…


Ce seul refrain nous montre la disposition d’esprit d’Apolline, et combien la souffrance et le malheur peuvent pervertir la plus belle âme ; elle, douce, bonne, fervente, aimante, religieuse, n’avait plus que du fiel dans la poitrine et du venin à la bouche. Elle haïssait tout, jusqu’à son créateur à qui elle reniait sa foi ; elle se vengeait en abandonnant à son tour Dieu qui l’avait abandonnée. Quand un être a été maltraité à ce point, il n’a plus qu’un rire d’enfer sur sa lèvre dédaigneuse, tout ce qui est, lui fait pitié, et provoque son dégoût ; plus une chose est sainte et sacrée, plus elle est révérée de tous, plus il trouve de joie à la profaner, à la fouler aux pieds. Pour le malheureux le blasphème est une volupté !