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introduction.

hallucinations fiévreuses, sont parfaitement reconnaissables dans la description des circonstances miraculeuses qui, suivant le peuple, signalent les apparitions des morts et les visites des lutins ; ce sont des voix au timbre aigu, qui se font entendre pendant le sommeil, et qui provoquent un réveil subit ; c’est un poids oppressant qui brise la poitrine du dormeur, un lit qui se soulève et change de place, des meubles qui s’entrechoquent et se renversent, sans qu’il reste le lendemain cependant aucune trace de dégât ou de bouleversement[1]. De même, dans toutes ces fasci-

  1. À propos des faits physiques qui ont participé à l’établissement des croyances superstitieuses, ce serait ici le cas, sans doute, de mettre en question si des phénomènes de la nature de ceux qui se manifestent dans l’état de somnambulisme naturel ou artificiel, ne tiennent pas une large place dans notre merveilleux populaire. Mais, pour être approfondi dans tous ses détails, cet examen exigerait bien des connaissances spéciales qui nous manquent. Nous nous contenterons donc de résumer, en une courte définition, ce que l’étude des doctrines et des faits relatifs aux sortilèges ou aux possessions a pu nous porter à induire sur ce sujet. Il nous semble impossible de douter que les prétendus sorciers n’aient possédé, jusqu’à un certain point, l’art de procurer des songes, des visions, et même de produire des apparitions. Cependant, leurs connaissances expérimentales devaient être assez bornées, si l’on en juge par les renseignements parvenus jusqu’à nous sur leurs pratiques secrètes ; car ces pratiques sont, en général, de la plus complète insignifiance, et n’ont guère d’autre mérite que de se rattacher à quelque rite défiguré des anciens cultes. Pour ce qui concerne les accidents étranges qui ont signalé les prétendues possessions, il est probable que les effets du magnétisme s’y trouvaient mêlés, à l’insu même de ceux qui les provoquaient ; mais encore ici la science et l’expérience faisaient défaut ; si bien que la ruse d’une part, et la maladie de l’autre, ont paru suffisantes, même aux témoins oculaires, pour expliquer les désordres extraordinaires qui se manifestaient chez les possédées.