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Page:Bosquet - La Normandie romanesque.djvu/312

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REVENANTS.

d’en troubler l’harmonie et la sécurité, mais elles seraient du moins justifiées aux yeux de la conscience et de la raison. La subjection de la destinée éternelle de l’ame à sa vie terrestre explique l’énergie de cette sympathie douloureuse qui rappellerait le mort aux lieux témoins des crises fatales de sa première existence. Quant au but ordinaire de l’apparition, à cet échange de vœux et de prières qui s’opère entre les vivants et les morts, ce n’est qu’un moyen de resserrer le lien de cette solidarité que la religion a proclamée comme loi de charité universelle, mais qu’une saine philosophie doit considérer de plus comme une rigoureuse équité. La fraternité humaine ne serait qu’un vain mot, si, ne tenant pas compte de la fatalité des circonstances extérieures, et de la fatalité plus absolue encore de l’organisation individuelle, dont les plus pernicieuses influences lui ont été épargnées, l’homme bon et juste, le vivant, suivant le sens divin du mot, ne se reconnaissait pas engagé à une pieuse restitution de mérites envers le méchant, le coupable, celui qui est mort, selon l’esprit et la grâce.