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DUCS DE NORMANDIE.

ducs de Normandie. Ces homonymes sont au nombre de trois : le premier en date est Rollon, qui reçut à son baptême le prénom chrétien de Robert. Entre la légende de Robert-le-Diable et l’histoire de Rollon-le-Pirate, se trouve un point de similitude remarquable : le fait d’une conversion religieuse, d’une transformation morale, accomplie avec un merveilleux héroïsme. De ce fait principal résulte, pour l’ensemble du rapprochement, un rapport de concordance qui disparaît bientôt à l’examen des détails ; car, dans les nombreuses aventures appartenant à l’histoire de l’un ou de l’autre personnage, il n’y a pas le moindre trait de ressemblance à noter. Aussi, quoique la plupart des critiques anglais se soient déclarés en sa faveur, Rollon est loin d’avoir obtenu un triomphe complet sur ses deux concurrents.

Robert I, ou le Magnifique, a pour lui la majorité des suffrages. Voyons cependant sur quoi se fondent des prétentions si facilement acceptées. Les exploits audacieux de Robert I, son caractère cruel et farouche, mais puissant dans tous les excès contraires, ses crimes sacriléges, ses résipiscences superstitieuses couronnées par son pèlerinage en Terre-Sainte, et sa mort au retour, paraissent autant de signalements précieux auxquels on pourrait reconnaître, en effet, le véridique représentant de Robert-le-Diable. Malheureusement, cette confrontation ne saurait être complète, l’histoire nous refusant certains détails sur la jeunesse de Robert I, qui ont une trop grande importance dans la vie du fabuleux héros, et qui tiennent trop de place dans la légende, pour qu’il soit permis de les négliger comme une superfétation oiseuse.

C’est, d’ailleurs, à l’aide de ces premières données biographiques que l’on peut faire valoir les droits du troisième concurrent : Robert Courte-Heuse[1]. Pour celui-ci, les turpitudes de sa jeunesse, ses impiétés filiales, sa révolte à main armée contre l’autorité de son père, en font bien le digne pendant

  1. A. Deville : Notice historique sur Robert-le-Diable, en tête de la publication du Mystère ; Rouen, Frère, 1836, in-8o.