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LÉGENDES ROMANESQUES.

pruntons, à l’excellent ouvrage des Monuments français inédits, la description, nécessaire à notre récit, de cette belle pierre sépulcrale : « Sous un dais, à riches fenestrages, sont représentés deux architectes, tenant chacun en main des instruments de leur état. Il ne peut y avoir de doute sur la désignation de celui de gauche, vêtu d’une longue robe fourrée, portant houseaux lacés, chevelure coupée au-dessus des oreilles, et chaperon rabattu dont la longue cornette est engagée, selon l’usage, sous la ceinture ; et qui tient, en outre, le plan d’une rose, dans laquelle, à cause d’une certaine ressemblance imparfaite, on a cru reconnaître celle du portail des Marmousets. Ce personnage, dont l’épitaphe encadre la figure, est Alexandre de Berneval, maistre des œuvres de machonnerie de cette église, qui trespassa l’an mccccxl. Mais la figure voisine, vêtue à peu près de la même manière, et dont, par un motif assez difficile à deviner, on a laissé l’épitaphe en blanc, est moins facile à reconnaître, et sa qualification sera probablement toujours un sujet de conjectures[1]. »

La légende, cette fille gracieuse de l’imagination du peuple, qui s’est plu à développer ses attrayantes rêveries dans toutes les pages de nos annales où font défaut les véridiques récits de la science ; la légende, disons-nous, s’est encore chargée d’expliquer quel rapport intime unissait, au célèbre architecte de Saint-Ouen, le mystérieux personnage qui figure à ses côtés sur la pierre de son sépulcre.

En 1439, maître Berneval ayant à dresser le plan des deux roses latérales de l’église, se réserva seulement de construire celle qui se trouvait du côté méridional, et abandonna à son élève la direction de celle qui était située du côté du nord. Lorsque ces deux roses furent achevées, il s’éleva de grands débats sur leur mérite réciproque : on trouvait que l’œuvre

  1. André Pottier, Texte des Monuments français inédits, gravés par N.-X. Villemin, t. ii, p. 5.