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LÉGENDES MERVEILLEUES.

joyeux carillons pour célébrer quelque fête solennelle, la cloche, demeurée au fond de la rivière, s’unissait à ces bruyantes volées, comme pour témoigner qu’elle était restée sur le sol de France, et que l’ennemi n’en avait pas fait sa conquête[1].


la fille du roi, à marier.


La romance que nous allons citer se chante encore, de nos jours, dans les environs de Saint-Valery-en-Caux. Sans pouvoir indiquer précisément l’origine de ce chant populaire, et l’époque de sa composition primitive, nous croyons ne pas former une conjecture dénuée de probabilité, en disant qu’il nous paraît avoir été composé à l’occasion du mariage de la princesse Catherine de France, fille de Charles vi, avec Henri v, roi d’Angleterre.

Le Roi a une fille à marier,
À un Anglois la veut donner,
Elle ne veut mais :
— Jamais mari n’épouserai s’il n’est François. —

La belle ne voulant céder,
Sa sœur s’en vint la conjurer :
— Acceptez, ma sœur, acceptez à cette fois,
C’est pour paix à France donner avec l’Anglois. —

Et, quand ce vint pour s’embarquer,
Les yeux on lui voulut bander :
— Eh ! ôte-toi, retire-toi, franc traître Anglois,
Car je veux voir jusqu’à la fin le sol françois. —

Et, quand ce vint pour arriver,
Le châtel étoit pavoisé :
— Eh ! ôte-toi, retire-toi, franc traître Anglois,
Ce n’est pas là le drapeau blanc du roi françois. —

Et, quand ce vint pour le souper,
Pas ne voulut boire ou manger :
— Éloigne-toi, retire-toi, franc traître Anglois,
Ce n’est pas là le pain, le vin du roy françois. —

  1. A. Canel, Essai sur l’arrondissement de Pont-Audemer, t. i, p. 379.