Page:Bosquet - Une femme bien elevee.pdf/134

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douce et qui n’est pas moins salutaire ni moins élevée que celles où ces poëtes prétendent nous guider.

« J’ai commencé mes études, car ce sont de vraies études, par Corneille, comme nous en étions convenues. Je vous assure que je m’attendais, avec le sublime qu’on lui attribue et que je veux bien lui reconnaître, à quelque chose de plus innocent. Si l’on ôtait à ses personnages cette poésie pompeuse qui en fait des êtres chimériques, je crois qu’il ne resterait pas des réalités très-estimables.

« Nous sommes émus des combats de Chimène entre l’amour et le devoir ; mais cette émotion découle d’une invraisemblance. Jamais une jeune fille sérieusement vertueuse ne se trouverait dans la position de recevoir chez elle son amant souillé du sang de son père ; c’est du fond d’un cloître qu’elle aurait poursuivi sa vengeance contre Rodrigue, à l’abri de toutes les coupables tentatives de son amour.

« Émilie, dans Cinna, est révoltante ; c’est un gibier de gendarme : est-ce que vous ne trouvez pas qu’elle ressemble à ces femmes ridicules et suspectes qui montent sur les barricades en temps de révolution ?