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vain d’éducation les rendait capables de beaucoup oser. Enfin, la différence entre cette génération et la vôtre, ma chère Adrienne, c’est que, dévotes et femmes, elles étaient plus femmes que dévotes, et que vous êtes plus dévotes que femmes. Je ne sais pas ce qu’elles feraient aujourd’hui, mais je sais qu’il y a seulement dix ans, quand elles étaient en coquetterie avec un homme ou des hommes, — en tout bien, tout honneur, — elles auraient vendu le pape pour un hommage de leur cour.

« Ne croyez pas, ma chère Adrienne, que je vous propose madame de Linières comme modèle. En vous la faisant connaître, j’ai voulu simplement vous prouver qu’un peu d’audace est quelquefois nécessaire ; qu’il ne faut jamais renoncer à son rôle de femme quand on veut assurer son triomphe, et que l’amour de Dieu autorise, je crois, des accommodements avec le pécheur, fût-il un mari. »

Madame de Nerville réussit jusqu’à un certain point à atteindre le but qu’elle s’était proposé en écrivant cette lettre. L’humeur et le mécontentement d’Adrienne se compliquèrent de perplexités. Une lumière importune irritait