Page:Bosquet - Une femme bien elevee.pdf/194

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un crime ? Loin que ce soit un crime, je crois que, de la part de Félicien, c’est un effort de vertu.

Cette parole, jetée peut-être à l’adresse de Cécile, ne la consola point. La persévérance de Félicien à essayer de s’attacher l’amour d’Adrienne lui disait trop combien le sentiment qui l’aurait attiré vers elle était combattu. Elle n’en concevait aucune animosité contre lui : il était sage et juste, elle égarée et coupable ! Elle s’abîmait dans son humilité, qui était encore une prosternation de son amour. C’était à son insu aussi que ses remords se dissipaient en songeries. Elle croyait ne penser, pour s’en faire un châtiment, qu’aux baisers et aux caresses donnés à Adrienne, et dans son rêve une substitution s’opérait bientôt : c’était vers elle-même que tendaient ces embrassements suppliants de l’amour, et c’était elle qui faiblissait devant cette irrésistible approche, qui lui apportait, comme celle d’un Dieu, des ravissements et des terreurs. Elle se perdait alors dans une adoration insensée jusqu’au moment où, reconnaissant sa méprise, les avertissements de sa pudeur réveillaient sa fierté : « Oh ! disait-elle, je suis lâche comme une femme de