Page:Bosquet - Une femme bien elevee.pdf/22

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très-défini dans son esprit. Aussi n’avait-elle fait au vœu de sa famille qu’une seule objection, encore était-elle plutôt dictée par la curiosité que par la prévoyance : « Comment lui présentait-on pour mari un homme dépourvu de principes religieux ? » Sa mère lui avait répondu, en l’embrassant avec orgueil, que c’était une preuve de la confiance particulière qu’on avait en elle, puisqu’on pensait ne rien hasarder de sa vertu en lui donnant à conquérir une âme au Seigneur.

Voilà pourquoi Adrienne passait, comme en triomphe et sans frémir, du contrat civil à la consécration religieuse, de l’autel au festin, du salon à la chambre nuptiale.

Quand on l’eut laissée seule, Félicien entra. L’homme le plus habitué aux péripéties des passions ne peut se défendre de douter de lui-même et d’éprouver une vague terreur, en présence de ce sphinx d’une virginité qui n’a trahi encore aucun de ses secrets, livrée qu’elle est par un consentement légal, et non par un abandon passionné. Félicien frissonnait. Mais je ne sais quoi dans le regard et le sourire même qui l’accueillirent lui révélèrent que, tout en se faisant l’esclave de la beauté de sa femme, il fal-