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Ils consentaient à se vouer aux tourments infinis de l’enfer, pour donner au Seigneur un témoignage incommensurable de leur amour. Tel est l’amour divin, et l’amour humain en est l’image, le calque et le reflet. Pourvu que celui-ci reste uni à son divin principe, il peut s’étendre aussi sans limite et sans mesure. Qu’aviez-vous besoin de les séparer ? Tous deux vous traçaient la même voie. Pour la gloire de Dieu et le salut de votre époux, vous deviez être prête à braver même la damnation éternelle. Peut-être serait-il encore permis à l’homme d’hésiter devant cette sublime folie du dévouement ; mais une sainte témérité convient à la femme. Doit-elle se laisser arrêter par une crainte égoïste, doit-elle douter des miracles de la grâce, celle à qui le Seigneur a dit : « Il lui sera beaucoup pardonné, parce qu’elle a beaucoup aimé ? »

Cette remontrance, dans la bouche du jeune lévite qui avait été son admirateur et son ami, produisit sur Adrienne un effet qu’on n’aurait pas attendu. « Et vous aussi ! » murmurait-elle d’une voix gémissante, comme autrefois César mourant. D’ailleurs, quoique les sentiments exprimés par Eusèbe fussent tout oppo-