Page:Bosquet - Une femme bien elevee.pdf/308

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s’opposait énergiquement à l’adoption de ce parti : elle croyait qu’un mauvais mari, comme Félicien, était encore un meilleur compagnon et un plus sûr protecteur pour une jeune femme que tout un cénacle d’amis, fussent-ils aussi pieux et aussi dévoués que ceux de madame Milbert.

La mère d’Adrienne, par un autre motif, hésitait elle-même devant cette extrémité. Elle craignait pour sa fille l’épreuve d’une jalousie justifiée. Elle savait bien que cette passion est la femme presque tout entière, et qu’elle tient à bien d’autres mobiles que l’amour.

Ses terreurs ne semblaient que faiblesse aux fortes têtes de son conseil : ne faut-il pas sacrifier quelque chose pour acheter le châtiment du vice et le triomphe de la vertu ? Mais avec le consentement même de madame Milbert toutes les difficultés n’étaient pas levées. Les magistrats qui prenaient part à la consultation déclarèrent que, malgré le bon vouloir des tribunaux, il était impossible de prononcer une séparation si l’on n’avait pas quelques injures, sévices ou torts graves à reprocher au mari. Les femmes soutenaient que l’infidélité constitue tout cela à la fois, et elles s’indignaient