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était trop remplie par l’attente de l’événement qui allait décider de son sort, pour qu’elle s’arrêtât à définir ce qui s’était passé dans son propre cœur. Mais Eusèbe, en lui donnant ses derniers encouragements, prononçait mentalement ce vœu : « Mon Dieu, rendez-lui le bonheur, et je promets de ne plus la revoir ! »

Le lendemain était un beau jour d’hiver : le soleil, réfléchi sur la neige, dispersait dans l’espace des rayonnements clairs et joyeux.

C’était comme une promesse de printemps. On devinait que la terre rejetterait bientôt son manteau de frimas pour laisser voir sa parure de primevères et de marguerites, telle que la coquette qui se dépouille du lourd vêtement sous lequel elle abritait sa vaporeuse toilette de bal.

Cécile, souriante aussi, partait pour son rendez-vous ; elle avait encore de l’impatience, elle n’avait plus de terreurs. Les reproches mêmes de sa conscience s’apaisaient dans la quasi certitude du châtiment, car elle atteignait, dans sa faute, à cet idéal de l’amour dont Eusèbe voulait douer la vertu d’Adrienne. Ce jour-là surtout, en songeant à son bonheur, il lui semblait qu’elle jouissait de la plénitude de l’exis-