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Page:Bossard - Gilles de Rais dit Barbe-Bleue, 1886.djvu/133

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GILLES DE RAIS.

admettre que ce drame ait été composé , ni même joué après 1440. Il est impossible qu’un auteur orléanais, contemporain de ces événements, ait osé mettre dans la bouche du roi ces paroles à Jeanne d’Arc :

                  Et pour vous conduire vos gens
                  Aurez le mareschal de Rais.

Il est impossible qu’il ait placé dans la bouche de la Pucelle répondant à Gilles de Rais, ces paroles élogieuses :

                  Nobles, vaillans princes gentilz.

Il est impossible qu’il ait montré le supplicié de la Madeleine, cet homme souillé par tant de meurtres et toutes sortes de crimes contre nature, couvrant de sa protection la douce et pudique vierge de Domrémy ; qu’il ait mêlé aux souvenirs glorieux de la patrie le fantôme des infamies honteuses d’un Gilles de Rais. Cette glorification d’un tel coupable est inadmissible. Aussi, à partir de 1440, n’est-il plus jamais question du Mystère du siège d’Orléans dans la liste des réjouissances de cette ville ; d’autres mystères en ont pris pour toujours la place ; celui-ci est tombé dans l’oubli : il semble que le

                      Sy a bien le cas exposé
                      Et n’en a on defailli goute.
                      De la Pucelle, en somme toute.
                      On ne luy doit riens refuser ;
                      Et que son plaisir on escoute
                      Que bel vois luy fait propposer.
                      Des places qui sont à avoir
                      Au lonc la riviere de Loire,
                      Bon seroit premier les avoir,
                      Que y nous sont trop en frontiere,
                      Et en nestoyer le repere,
                      Ains que proceder plus avant ;
                      Et ne vous doubtez de victoire
                      Que elle vous est preminant *.

    (* Vers 14968 et suivants.)

    À partir de cet instant, le roi met la Pucelle sous la garde du duc d’Alençon, qui prend ainsi auprès d’elle la place du maréchal de Rais ; mais celui-ci l’accompagne, sinon au même titre, du moins avec le même dévouement.