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MYSTÈRE DU SIÈGE D’ORLÉANS.

heureux que M. A. Guéraud, nous avons pu, grâce à la publication du manuscrit du Vatican, constater que le Mystère du siège d’Orléans contient plus que des allusions à la personne et au rôle du maréchal de Rais ; et, pour des raisons plus décisives encore que les siennes, nous pensons qu’il faut adopter son récit tout entier. Plus encore que l’écrivain nantais, M. Vallet de Viriville est affirmatif : « Il présida, dit-il, en 1436[1], — (peut-être en septembre et en novembre 1439, en présence du roi,) à l’exécution du mystère de la Pucelle, qui fut célébré à Orléans et dans lequel il est glorifié par un rôle spécial… Il dépensa cette année-là de quatre-vingts à cent mille écus d’or durant son séjour en cette ville. »

Tels sont les rapports qu’offre le Mystère du siège d’Orléans avec le maréchal de Rais. En l’étudiant, on se transporte par l’imagination au jeu de ce drame immense, si vrai, si populaire, et j’ajouterai si émouvant dans sa simplicité historique. Quand il se déroulait aux yeux du peuple Orléanais, sauvé contre toute espérance d’un ennemi terrible, et devant ces guerriers qui en avaient été les héros avant d’en être les témoins ou les acteurs, quel attrait puissant devait présenter un drame qui remettait sous leurs yeux, moins de dix ans après, tous les détails de la délivrance !

Quand les Athéniens virent jouer pour la première fois les Perses d’Eschyle, qui leur rappelaient si vivement le combat de Salamine, la défaite de Xerxès, et le triomphe de la Grèce, on dit qu’il s’éleva dans toute l’assemblée des cris et dés applaudissements. Quelque chose d’analogue dut se passer, ce semble, la première fois que fut représenté le Mystère du siège d’Orléans. Comme pour les Perses d’Eschyle, c’est quelques années seulement après la délivrance de la ville ; le peuple, qui avait tremblé devant l’anglais envahisseur et insolent, est là accouru de toutes parts ; comme Thémistocle vainqueur, ils sont là aussi, ces généraux célèbres, ces

  1. Il était à Orléans en 1434 et 1430, comme nous l’avons vu plus haut.