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GILLES DE RAIS.

elles sont entourées, n’obscurcissent en rien la lumière où sont placés les effets ; les faits sont indéniables. Qui les rejeterait devrait en même temps déchirer les pages les plus authentiques de l’histoire profane et religieuse. Ils ont reçu de la justice même, en effet, la marque de vérité la plus évidente qui puisse être imprimée à aucun événement humain ; confessés, affirmés par les coupables eux-mêmes, avec des torrents de larmes, devant des milliers de témoins accourus de tous les points de la Bretagne, du Maine, de l’Anjou et du Poitou ; devant un tribunal où siègent des hommes illustres par le rang, le nom et l’éducation ; au milieu des deux grandes cours, où s’exercent la justice de l’Église et celle de l’État ; relatés dans des documents officiels dont les originaux, grâce à la vigilance des siècles, nous sont parvenus dans toute leur intégrité ; signés des noms les plus respectables ; munis du sceau de l’autorité religieuse et civile ces faits sont indéniables.

Si ces évocations n’avaient pas eu lieu, accompagnées’ des crimes inouis contre la nature, contre Dieu et contre la société, l’Église n’aurait pu frapper cet homme d’un si grand coup.

Mais s’il faut admettre que les motifs de la condamnation, fondés sur les pratiques de la magie, sont établis sur les preuves les plus convaincantes, oserait-on dire, par exemple, que ces preuves elles-mêmes, c’est-à-dire les dépositions des témoins et les aveux des coupables, soient fausses, controuvées ? Gilles ne peut avoir menti jusque dans ses larmes, jusque en face de la mort, jusque sur le bûcher, en présence des siens en pleurs et de la honte éternellement attachée à sa mémoire. Loin de tout danger, le rôle est possible dans un charlatan qui met son profit et son orgueil à duper la foule crédule ; l’orgueil humain a de telles audaces ! Mais devant des juges qu’on sait devoir être inflexibles, et devant la mort qu’on sait être inévitable, de telles farces ne se jouent pas, ne peuvent se jouer ; on cache ces horreurs, on les nie effrontément, et c’est ce que Gilles