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XVIII
INTRODUCTION

considérons la nature de celles qui nous restent, il nous est permis de croire que les faits les plus importants nous sont parvenus. Or, un lecteur n’a rien à désirer de plus ; car l’histoire d’un homme, comme le dit justement Voltaire, « n’est pas tout ce qu’il a fait, mais tout ce qu’il a fait de digne d’être transmis à la postérité.[1] » D’ailleurs, sur bien des points une demi-lumière convient singulièrement autour d’un homme qui a cherché à s’envelopper de mystère et de ténèbres.

Enfin, l’authenticité et la pureté des sources, où nous avons constamment puisé, nous assurent la première qualité nécessaire à l’historien, la vérité : l’importance des faits aura-t-elle communiqué au récit assez d’intérêt pour préserver l’écrivain du plus grand des défauts, l’ennui ? Nous avons la conviction d’avoir évité l’erreur ; d’ailleurs, la calomnie, même inconsciente, serait difficile envers Gilles de Rais ; il est, en effet, du triste et petit nombre d’hommes qui, par leurs crimes, surpassent en mal l’imagination de l’écrivain : ici, la fiction ne saurait l’emporter sur la réalité et le roman restera toujours, hélas ! au-dessous de l’histoire. Puisse le récit avoir reçu de l’importance et de la variété de faits sur la vérité desquels il ne saurait s’élever aucun doute, assez d’intérêt pour qu’on puisse dire de cet ouvrage qu’il est aussi attrayant que véridique ! C’est au lecteur d’en juger ; c’est à son esprit, c’est à son bon goût, et l’on oserait presque dire à son indulgence, si l’indulgence qui fait pardonner un livre était ce qui le fait goûter. Un auteur est à plaindre, qui n’obtient de ses amis que l’indulgence et d’inconnus ou d’adversaires que de justes critiques. Le mieux sans doute serait de forcer les uns et les autres, non pas à l’admiration, ce qui serait trop

  1. Voltaire : Préface de l’Histoire de Charles XII.