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LE TRIBUNAL.

Eucharistie, Gilles obtient une dernière grâce, une procession solennelle du clergé et du peuple de Nantes pour lui mériter le pardon de ses grands forfaits, on sent que le père s’émeut, que son cœur s’ouvre à la joie causée par un changement si inespéré ; que son âme, enfin, par ce repentir si spontané, est consolée des amertumes inévitables de semblables débats[1].

Dès le 19 septembre, l’évêque de Nantes s’adjoignit, mais du consentement même de Gilles[2], un juge dont les pouvoirs et le rôle furent considérables à côté de ceux de Jean de Malestroit[3]. C’était frère Jean Blouyn, de l’Ordre des Frères-Prêcheurs, du couvent de Nantes. En l’année 1426, il avait été délégué par le grand inquisiteur de France, Guillaume Mérici, comme vice-inquisiteur pour la ville et le diocèse de Nantes. Jean Blouyn était âgé de quarante ans et remplissait les devoirs de sa charge avec une modération, une fermeté, une droiture et un jugement dignes de tout éloge et appréciés de tout le monde.

Comme promoteur, dont la charge était analogue à l’office de notre ministère public, l’évêque nomma Guillaume Chapeillon, curé de Saint-Nicolas de Nantes, qui déjà avait partagé, avec Jean de Malestroit, tous les soucis de l’enquête secrète : homme de talent et d’énergie, en lui toute autre qualité fut dominée par une ardeur étonnante à poursuivre le crime et une fermeté inébranlable au milieu même des plus violents emportements de l’accusé. Les principaux assesseurs furent Guillaume de Malestroit, évêque nommé du Mans, Jean Prégent, évêque de Saint-Brieuc[4], Denis de la Lohérie, évêque de Saint-Lô[5], Jacques de Pentçoetdic, offi-

  1. Jean de Malestroit, appelé, dans la Gallia christiana, Jean de Châteaugiron, mourut trois ans après Gilles de Rais, en 1443.
  2. Proc, ecclés., Séance du 19 sept. 1440.
  3. Proc. ecclés., Acte d’accusation ; art. XIII ; p. XIX.
  4. J. Prégent, évêque de Saint-Brieuc. D’après du Paz, Hist. générale de Bretagne, il n’aurait été élu qu’en 1444, et d’après la Gallia Christiana, en 1450. On voit qu’il l’était en 1440. Il mourut en 1462.
  5. Il est assez difficile d’établir quel fut le siège épiscopal de Denis de la Lohérie. Le texte porte Laodicensis et Laudicensis ; et les divers sièges épiscopaux qui se rapprochent de ces noms, étaient occupés alors par d’autres