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XIII


APRÈS LA MORT. — LE SOUVENIR. — LE PORTRAIT. LA RESPONSABILITÉ.

L’impression produite sur la foule par la mort de Gilles de Rais fut si grande, que le souvenir ne s’en est point effacé, et cette perpétuité ne vient pas moins du supplice et des circonstances, dont il fut accompagné ou suivi, que des crimes inouïs qui l’avaient précédé. Il faut ajouter certains détails, dont l’étrange n’appartient qu’aux mœurs de cette époque, et résoudre diverses questions dont on comprendra toute l’importance.

Les pères et les mères de famille, au dire de plusieurs historiens, jeûnèrent trois jours pour mériter aux coupables la délivrance et le repos de leurs âmes, et donnèrent à leurs enfants le fouet jusqu’au sang, afin d’imprimer profondément dans leur mémoire le souvenir du crime et celui du châtiment. C’est une coutume qui existait encore au commencement du xvie siècle. Rabelais dit en effet quelque part : « Puis y accourûst le maistre d’eschole, avec tous ses pédagogues, grimaulx et escholiers, et les fouettait magistralement, comme on soulait fouetter les petits enfants en nos pays, quand on pendait quelque malfaiteur, afin qu’il leur en soubvinst[1] ! » Tous les chefs de famille devaient assister à l’exécution, afin de frapper plus vivement les esprits et inspirer à tout le

  1. Pantagruel, l. IV. chap. XLVIII.