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Page:Bossard - Gilles de Rais dit Barbe-Bleue, 1886.djvu/9

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des Travaux historiques et à M. le Ministre de l’Instruction publique de leur accorder une place dans la collection des Documents inédits relatifs à l’Histoire de France[1].

Cette proposition fut accueillie avec sympathie ; mais, après la lecture des pièces, cette sympathie fit place à un véritable mouvement d’effroi. Les enquêtes latines, rédigées par ordre de l’évêque de Nantes, nous apportaient le récit de crimes monstrueux, et, bien que la condamnation finale leur appliquât le sceau de la moralité, ce récit, dépourvu d’artifice et d’explications, causa de tels ravages dans l’esprit bienveillant des membres du Comité, leur laissa une impression si profonde, que je fus moi-même effrayé de mon œuvre. Mes documents reprirent immédiatement leur place dans un carton fermé avec soin et sans doute ils y seraient encore si la Providence, sous les traits d’un honorable et excellent confrère, M. Marchegay, l’éditeur bien connu du Chartrier de Thouars, ancien archiviste de Maine-et-Loire et propriétaire en Vendée du domaine des Roches-Baritaud, ne fût venue à mon aide.

M. Marchegay voulut bien me mettre en rapports avec un descendant des administrés de Gilles de Rais, M. l’abbé Bossard, qui, séduit, comme moi, par cette figure, entreprenait de son côté d’en écrire l’histoire, sans rien dissimuler des imperfections de son modèle, mais aussi en laissant leur place légitime aux côtés étranges et romanesques de sa vie, au caractère exemplaire de sa fin. On ne pouvait que se hâter de profiter d’une si bonne fortune ; je ne songeai plus dès lors à un projet que M. l’abbé Bossard, devenu mon ami, était si à même de réaliser en racontant les aventures de Gilles de Rais ; heureux de penser que la mémoire de notre héros n’y perdrait rien et que moi-même, comme Gilles, si j’avais fait le mal, du moins je finissais bien. Mais j’ai publié, à la fin du présent volume, comme Pièces justificatives, une partie des documents originaux qui ont servi à sa composition, et notamment la presque totalité du procès cri-

  1. Du Cange a utilisé l’enquête française, que je publie, pour son Dictionnaire.