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Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/170

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L’homme ne garde pas un commandement d’une si facile observance : il écoute l’esprit tentateur, et il s’écoute luy-mesme, au lieu d’écouter Dieu uniquement : sa perte est inévitable, mais il la faut considerer dans son origine aussi-bien que dans ses suites.

Dieu avoit fait au commencement ses anges, esprits purs et separez de toute matiere. Luy qui ne fait rien que de bon, les avoit tous créez dans la sainteté, et ils pouvoient asseûrer leur felicité en se donnant volontairement à leur créateur. Mais tout ce qui est tiré du neant est défectueux. Une partie de ces anges se laissa seduire à l’amour propre. Malheur à la créature qui se plaist en elle-mesme, et non pas en Dieu ! Elle perd en un moment tous ses dons. Etrange effet du peché ! Ces esprits lumineux devinrent esprits de tenébres : ils n’eurent plus de lumiéres qui ne se tournassent en ruses malicieuses. Une maligne envie prit en eux la place de la charité ; leur grandeur naturelle ne fut plus qu’orgueïl ; leur felicité fut changée en la triste consolation de se faire des compagnons dans leur misere, et leurs bienheureux exercices au miserable employ de tenter les hommes. Le plus parfait de tous, qui avoit aussi esté le plus superbe, se trouva le plus malfaisant, comme le plus malheureux. L’homme que Dieu avoit mis un peu au dessous des anges , en l’unissant à un corps, devint à un esprit si parfait un objet de