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Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/185

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mais sans terres et sans domaine ; et toutefois il vivoit dans un royaume étranger, respecté, et indépendant comme un prince. Sa pieté et sa droiture protegée de Dieu, luy attiroit ce respect. Il traitoit d’égal avec les rois qui recherchoient son alliance, et c’est de là qu’est venuë l’ancienne opinion qui l’a luy-mesme fait roy. Quoy-que sa vie fust simple et pacifique, il sçavoit faire la guerre, mais seulement pour défendre ses alliez opprimez. Il les défendit, et les vengea par une victoire signalée : il leur rendit toutes leurs richesses reprises sur leurs ennemis sans réserver autre chose que la dixme qu’il offrit à Dieu, et la part qui appartenoit aux troupes auxiliaires qu’il avoit menées au combat. Au reste, aprés un si grand service, il refusa les presens des rois avec une magnanimité sans exemple, et ne put souffrir qu’aucun homme se vantast d’avoir enrichi Abraham. Il ne vouloit rien devoir qu’à Dieu qui le protegeoit, et qu’il suivoit seul avec une foy et une obéïssance parfaite. Guidé par cette foy, il avoit quitté sa terre natale pour venir au païs que Dieu luy montroit. Dieu qui l’avoit appellé, et qui l’avoit rendu digne de son alliance, la conclut à ces conditions.

Il luy déclara qu’il seroit le Dieu de luy et de ses enfans, c’est à dire qu’il seroit leur protecteur, et qu’ils le serviroient comme le seul Dieu créateur du ciel et de la terre.