juifs au dernier siége de Jérusalem. Les chaldéens ne leur avoient rien fait souffrir de semblable. Sous les chaldéens leur captivité ne dura que soixante et dix ans : il y a seize cens ans qu’ils sont esclaves par tout l’univers, et ils ne trouvent encore aucun adoucissement à leur esclavage. Il ne faut plus s’étonner si Tite victorieux, aprés la prise de Jerusalem, ne vouloit pas recevoir les congratulations des peuples voisins, ni les couronnes qu’ils luy envoyoient pour honorer sa victoire. Tant de mémorables circonstances, la colere de Dieu si marquée, et sa main qu’il voyoit encore si presente, le tenoient dans un profond étonnement ; et c’est ce qui luy fit dire ce que vous avez oûï, qu’il n’estoit pas le vainqueur, qu’il n’estoit qu’un foible instrument de la vengeance divine.
Il n’en sçavoit pas tout le secret : l’heure n’estoit pas encore venuë où les empereurs devoient reconnoistre Jesus-Christ. C’estoit le temps des humiliations et des persécutions de l’eglise. C’est pourquoy Tite assez éclairé pour connoistre que la Judée perissoit par un effet manifeste de la justice de Dieu, ne connut pas quel crime Dieu avoit voulu punir si terriblement. C’estoit le plus grand de tous les crimes ; crime jusques alors inoûï, c’est à dire le déïcide, qui aussi a donné lieu à une vengeance dont le monde n’avoit veû encore aucun exemple.