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Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/404

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autre payen ne les a jamais soupçonné d’estre supposez : au contraire, tous leur ont donné les mesmes auteurs que les chrestiens. Les héretiques, quoy-qu’accablez par l’autorité de ces livres, n’osoient dire qu’ils ne fussent pas des disciples de Nostre Seigneur. Il y a eû pourtant de ces héretiques qui ont veû les commencemens de l’eglise, et aux yeux desquels ont esté écrits les livres de l’evangile. Ainsi la fraude, s’il y en eust pû avoir, eust esté éclairée de trop prés pour réüssir. Il est vray qu’aprés les apostres, et lors que l’eglise estoit déja étenduë par toute la terre, Marcion et Manes constamment les plus temeraires et les plus ignorans de tous les héretiques, malgré la tradition venuë des apostres, continuée par leurs disciples et par les evesques à qui ils avoient laissé leur chaire et la conduite des peuples, et receûë unanimement par toute l’eglise chrestienne, oserent dire que trois evangiles estoient supposez, et que celuy de Saint Luc qu’ils préferoient aux autres, on ne sçait pourquoy puis qu’il n’estoit pas venu par une autre voye, avoit esté falsifié. Mais quelles preuves en donnoient-ils ? De pures visions, nuls faits positifs. Ils disoient pour toute raison, que ce qui estoit contraire à leurs sentimens devoit nécessairement avoir esté inventé par d’autres que par les apostres, et alleguoient pour toute preuve les opinions mesmes qu’on leur contestoit ; opinions d’ailleurs si extravagantes,