Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/428

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croire tant de choses si dignes de luy, et tout ensemble si impenétrables à l’esprit humain. Mais plustost il faut s’étonner de ce qu’ayant établi la foy sur une autorité si ferme et si manifeste, il reste encore dans le monde des aveugles et des incrédules.

Nos passions desordonnées, nostre attachement à nos sens, et nostre orgueïl indomptable en sont la cause. Nous aimons mieux tout risquer, que de nous contraindre : nous aimons mieux croupir dans nostre ignorance que de l’avoûër : nous aimons mieux satisfaire une vaine curiosité, et nourrir dans nostre esprit indocile la liberté de penser tout ce qu’il nous plaist, que de ployer sous le joug de l’autorité divine. De là vient qu’il y a tant d’incrédules, et Dieu le permet ainsi pour l’instruction de ses enfans. Sans les aveugles, sans les sauvages, sans les infideles qui restent, et dans le sein mesme du christianisme, nous ne connoistrions pas assez la corruption profonde de nostre nature, ni l’abisme d’où Jesus-Christ nous a tirez. Si sa sainte verité n’estoit contredite, nous ne verrions pas la merveille qui l’a fait durer parmi tant de contradictions, et nous oublierions à la fin que nous sommes sauvez par la grace. Maintenant l’incrédulité des uns humilie les autres ; et les rebelles qui s’opposent aux desseins de Dieu font éclater la puissance par laquelle indépendemment de toute autre chose