Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/485

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et des campemens, et enfin une certaine conduite qui fait remuër ces grands corps sans confusion et à propos. Ils croyoient avoir tout fait quand qui alloit au combat assez résolument, mais sans ordre, et qui se trouvoit embarassé d’une multitude infinie de personnes inutiles que le roy et les grands traisnoient aprés eux seulement pour le plaisir. Car leur mollesse estoit si grande, qu’ils vouloient trouver dans l’armée la mesme magnificence et les mesmes délices que dans les lieux où la cour faisoit sa demeure ordinaire ; de sorte que les rois marchoient accompagnez de leurs femmes, de leurs concubines, de leurs eunuques, et de tout ce qui servoit à leurs plaisirs. La vaisselle d’or et d’argent, et les meubles précieux suivoient dans une abondance prodigieuse, et enfin tout l’attirail que demande une telle vie. Une armée composée de cette sorte et déja embarassée de la multitude excessive de ses soldats, estoit surchargée par le nombre demesuré de ceux qui ne combatoient point. Dans cette confusion, on ne pouvoit se mouvoir de concert ; les ordres ne venoient jamais à temps, et dans une action tout alloit comme il pouvoit, sans que personne fust en estat d’y pourvoir. Joint encore qu’il falloit avoir fini bientost, et passer rapidement dans un païs : car ce corps immense et avide non seulement de ce qui estoit necessaire pour la vie, mais encore de ce qui servoit