Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/515

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Mais comme il ne suffit pas d’entendre la guerre si on n’a un sage conseil pour l’entreprendre à propos, et tenir le dedans de l’estat dans un bon ordre, il faut encore vous faire observer la profonde politique du senat romain. à le prendre dans les bons temps de la république, il n’y eût jamais d’assemblée où les affaires fussent traitées plus meûrement, ni avec plus de secret, ni avec une plus longue prévoyance, ni dans un plus grand concours, et avec un plus grand zele pour le bien public. Le saint esprit n’a pas dédaigné de marquer cecy dans le livre des machabées, ni de loûër la haute prudence et les conseils vigoureux de cette sage compagnie où personne ne se donnoit de l’autorité que par la raison, et dont tous les membres conspiroient à l’utilité publique sans partialité et sans jalousie. Pour le secret, Tite Live nous en donne un exemple illustre. Pendant qu’on meditoit la guerre contre Persée, Eumenes roy de Pergame ennemi de ce prince vint à Rome pour se liguer contre luy avec le senat. Il y fit ses propositions en pleine assemblée, et l’affaire fut résoluë par les suffrages d’une compagnie composée de trois cens hommes. Qui croiroit que le secret eust esté gardé, et qu’on n’ait jamais rien sceû de la déliberation que quatre ans aprés quand la guerre fut achevée ? Mais ce qu’il y a de plus surprenant, est que Persée avoit à Rome