Page:Botrel - Le Mystere de Keravel.djvu/12

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fable, vers lequel, tous les ans, s’embarquait la jeunesse ! Combien en dévore-t-il encore, chaque année, de nos gâs ? Reste ici, Henriot, jette l’ancre et pour toujours dans ce havre d’oubli. L’existence t’y sera douce.

François. — Une chaîne dorée est toujours une chaîne ! Et puis, ici, je ne suis pas moi : je suis François, l’intendant !

Robert. — Mais si, tu es toi, Henry, pour moi, du moins, pour moi, ton frère… Cela ne te suffit-il pas ? Veux-tu que je révèle ta survie à notre frère Jean, ce bon Jean qui te croit mort ?… Il en serait heureux !

François. — Ma foi, non, je n’y tiens pas…

Robert. — Sauvageon, va !… Allons, voyons, chasse une bonne fois de ton esprit ces rêves aventureux, comme on chasse un vol de mouettes ; et promets-moi, Henry, promets-moi de rester ici, désormais, toujours à mes côtés, dans notre vieux manoir, prêt à te dévouer pour mon petit gâs déjà sans maman, si, quelque jour, moi aussi, je venais à lui manquer.

François. — Oui, oui, c’est bon, là ; je te le promets.


Scène V

Les mêmes, JEAN[1], entrant à droite

Robert. — Ah ! c’est toi, mon bon Jean…

Jean. — Pourrais-je vous parler un instant, mon frère ?

Robert. — Certes, oui… parle.

Jean, faisant un signe vers François. — C’est que…

  1. Les artistes qui interpréteront ces deux rôles de Jean et François devront avoir même taille, même allure, même silhouette en un mot. Mais autant François a l’abord brutal et antipathique, autant les manières et la voix de Jean sont douces et avenantes.