Aller au contenu

Page:Botrel - Le Mystere de Keravel.djvu/22

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Robert, bas, à Yves. — Petit poltron sans cœur : c’est un pauvre et un pauvre qui a faim…

Yves. — Moi aussi, j’ai faim.

Jacques, apportant une soupière fumante. — V’là une bonne soupe.

Yves. — D’abord, je l’aime pas, ta soupe !

Robert. — Refuser un si bon potage !

Pierre-qui-roule, mangeant. — C’est un vrai péché !

Robert. — Oui, quand on songe qu’il y a des pauvres, comme notre hôte, qui n’ont pas même, parfois, un morceau de pain pour se rassasier.

Yves. — Ben vrai, c’est pas beaucoup. (Il va à Pierre-qui-Roule.) C’est vrai que tu es pauvre, dis, Monsieur Qui-Roule ?

Pierre-qui-roule. — Comme Notre-Seigneur dans l’étable, au soir de sa naissance !

Yves. — Pourquoi que t’es pauvre, dis ?

Pierre-qui-roule. — Ah ! dame ! j’ saurais pas vous dire, mon petit monsieur. On sait, des fois, pourquoi on devient riche… mais on ne sait jamais pourquoi on vient au monde pauvre comme un gueux.

Yves. — Attends. (Il prend son assiette.)

Robert. — Que fais-tu, Yves ?

Yves. — Je lui donne ma soupe… puisqu’il a si grand faim… (On rit.)

Robert. — Ah ! petit malin ! Voilà une charité qui ne te privera guère ! Ça, qu’on passe la miche à ce brave homme !

Jacques. — Voici ! Attendez, que je vous donne un couteau.

Pierre-qui-roule. — Inutile ! J’ai-t-y pas le mien ? et un fameux, allez ! (Il le tire et l’ouvre.)

Yves. — Papa… j’ai peur !

Robert. — Encore ! De quoi ?