François. — Tout à fait saoul perdu, comme on dit par ici !
L’Étranger. — Alors, vous voulez comment qu’un homme ivre à ce point réussisse un travail de précision comme celui qui consiste à exactement déposer les pieds dans les mêmes traces, à l’arrivage et au départure ?
Jean. — Il avait peut-être simulé l’ivresse.
M. Duflair. — C’est ce que je me suis dit.
L’Étranger. — Laissons-nous continuer ! Les traces sont dès lors indéchiffrables, vous disez ?
M. Duflair. — Oui… pour tout le monde… mais pas pour un limier tel que moi ; arrivé au bord de cette fenêtre, le gredin a retiré ses sabots ; puis, son crime accompli, il a fait demi-tour… mais n’a pas songé à mettre ses sabots, à rebours, dans les deux premières empreintes ; les autres seules, par conséquent, ont été brouillées. J’ai donc ici deux bonnes empreintes moulées.
John et Jacques. — En plâtre !
M. Duflair. — Oui, emplâtres ! (Il fouille dans la boîte et en tire une sorte de grand moulage plat et carré.) Voici.
L’Étranger. — All right ! Avez-vous les sabots du chemi…
M. Duflair. — Neau… Les voici ! Par une étrange coïncidence, ils ressemblent fort à ceux du domestique, étant neufs tous les quatre et achetés, tous les quatre, dans la même contrée. Comparez.
L’Étranger, regardant les sabots. — Les sabots de l’inculpé n’ont rien à faire ici. Mettez au feu !
Tous. — Hein ?
M. Duflair. — Comment ? le vagabond ne serait pas coupable ?
L’Étranger. — Lui, peut-être… mais ses sabots… no !
M. Duflair. — Alors…